Fut un temps où ma jeunesse, mon inconscience,
l’absence de gamins, me permettaient de quitter un boulot lorsque je
considérais que la compétence du patron ne correspondait pas à mes attentes. Je
reconnais que le fait d’écrire cette phrase implique une haute estime de soi.
Surtout qu’à l’époque je n’étais qu’un simple stagiaire en quête de savoir.
D’ailleurs peu importe, ce comportement m’a permis d’atterrir dans des
entreprises aux dirigeants compétents et aimant léguer leur savoir.
Ensuite lorsque je devins capable d’exercer mon
métier, j’eus la chance d’être toujours respecter et libre d’appliquer mes
compétences à ma convenance. Puis un concours de circonstance aidant, je créais
ma propre entreprise où cette fois je dus supporter un patron irascible. La
naissance d’enfants et le manque de temps à leur consacrer imposèrent la vente
de l’entreprise.
Après quelques années sabbatiques, je réintégrai le
monde du travail dans une petite entreprise familiale.
Ça fait un an que j’y suis et je m’arrache les
cheveux.
La maxime de l’entreprise est d’une simplicité à
faire frissonner une pierre tombale : « pourquoi faire simple
quand on peut faire compliquer. »
Sincèrement, mon imagination pourtant parfois
délirante n’aurait jamais pu concevoir une telle démence. Je n’ai jamais autant
travaillé et produit aussi peu. C’est la première fois que je bosse sur autant
de projets en même temps et que pratiquement aucun n’aboutisse. J’ignorais
jusqu’à maintenant que l’on pouvait bosser constamment dans l’urgence et ne
jamais achever sa besogne car elle est remplacée par une autre urgence, qui
jaillit comme une giclée de sperme des brumes dictatoriales de la direction. Cette
autre urgence sera évidemment sans
conclusion. Si une proposition est faîte par un salarié, elle ne sera jamais
prise en considération surtout si elle peut être bénéfique à l’entreprise, à
moins qu’elle soit présentée comme une idée insensée.
Le plus incroyable est que cette entreprise est
encore viable. Je n’ose pas imaginer ce qu’elle pourrait devenir si la maxime
susdite était abandonnée.
Jusqu’à maintenant, je n’avais ni réussi, ni tenter
de couper des cheveux en quatre. Ainsi après un an de travail dans cette
entreprise j’y arrive presque. Comme quoi, même dans les endroits où le mot compétence
est inconnu, il est possible de progresser.
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