Aujourd’hui, c’est jour de fête. Nous partons en
famille à la "manif pour tous ". Les chaussures sont cirées, les
socquettes plus blanches que blanches, les habits repassés, le corps récuré et
l’âme pure. Avant de nous lancer dans le
combat pour notre juste cause, nous nous rendons à la messe afin de communier.
Dans l’église, nous sommes tous fébriles et complices. Toutes les personnes
présentes seront de la manif. Il y a même déjà des drapeaux et des banderoles
prêtes à être déroulées.
Les plus jeunes ont retrouvés leur camarade de
classe de l’école Sainte Bernadette. Pendant que les adultes discutent des
derniers préparatifs, les enfants jouent gentiment dans le square attenant à
l’église. Les mères veillent à ce que leur progéniture ne tache pas leurs habits
de parade.
La grande majorité des participants ira à Paris en
train. Nous, nous déplacerons en voiture car nous devons prendre ma mère à Luzarches.
Elle désire aussi participer à la " manif pour tous ". Nous regrettons
de ne pas accompagner nos amis, d’autant plus que le voyage en train ne sera que
liesse et ferveur.
Après une rapide collation, nous partons. Nous
devons être à porte Dauphine avant treize heures.
Durant la collation, ma plus jeune fille m’a
interpelé :
- Papa vous allez manifester parce qu’un français a
été tué en Algérie ?
- Mais non ma fille, nous voulons que tous les
enfants aient un papa et une maman.
Ensuite le
plus grand m’a questionné sur le massacre des populations civiles en Irak et en
Syrie.
J’ai exprimé mon désaccord et mon dégout sur de tels
actes.
En arrivant
sur Paris, nous surplombons un camp de tentes, un bidonville occidental. La plus
jeune qui a oublié de mettre sa langue dans sa poche dit :
- On va manifester pour eux ?
- Mais non, nous allons manifester pour que tous les
enfants soient respectés.
Je ne sais
pas comment lui expliquer que nous luttons contre la gestation pour autrui.
- Alors nous manifestons pour que les familles qui
traversent la méditerranée ne meurent pas noyées, répond-elle.
Pour avoir la paix, je réponds oui en me promettant
de n’écouter les informations que pendant son absence.
Je regrette de plus en plus d’avoir pris la voiture,
surtout que le grand m’asticote sur La GPA. Devant les petits, je ne sais pas comment
argumenter, ils ne connaissent pas encore les mystères de la procréation naturelle. Je tiens à préserver
leur innocence.
J’aurais dû le laisser à l’institution du Saint-Esprit
au lieu de l’inscrire dans un lycée laïc. Il a des idées quasiment révolutionnaires
depuis qu’il fréquente cet établissement. Il nous répond que les armes ne sont
pas naturelles et qu’elles font des ravages. Que mourir de faim est surement
naturel, car il n’a pas connaissance de mouvement de masse pour tenter de stopper
la misère partout où elle est.
Les jeunes ne connaissent rien à la vie, confondent
et mélangent tout, et en plus ils se permettent de nous donner des leçons.
Je réponds que nous ne pouvons pas lutter contre
toute la misère qu’il y a dans le monde. Que ces pays sont responsables de leur
avenir et que nous avons déjà nos propres problèmes à régler.
Promis juré, il fera sa terminale S dans le privé.
Avant de sortir de la voiture, il m’assène le coup
de grâce :
- Je ne comprends pas votre démarche. Je peux comprendre
que vous soyez contre la G.P.A. et la
procréation médicalement assistée, mais c’est quand même donner la vie. Alors que
la prolifération des armes, la famine dans le monde, les massacres de
populations, le capitalisme sauvage, l’augmentation de la pauvreté suppriment
des vies. Sincèrement, même si le sujet a son importance, je considère qu’il
est dérisoire par rapport à de nombreux faits d’actualité. Je considère que la chrétienté
a d’autres combats à mener. Votre manifestation va à l’encontre de vos valeurs.
Vous préférez la mort à la vie !
Promis juré, je ne mettrai plus mes gamins dans le laïc.
Qu'est ce donc ce que vous appelez "laïc" ? Oh mon Dieu, ne devenez pas mécréant ? Purifiez-vous.
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