Le chemin qui même à l’ordinateur, mon outil de
travail, est de plus en plus encombré. Le débroussailleur, la serpe et la
hachette peinent à déblayer un tel enchevêtrement. Hercules refuse de s’atteler
à un tel travail. Ce n’est pas la tâche insurmontable qui le rebute, c’est le
chiffre treize, d’après lui, ce chiffre porte malheur. Donc, je n’ai que mes
dix doigts pour me frayer un passage. La persévérance paye parfois, comme ce
matin où je suis devant le clavier. Toute la nuit fut nécessaire pour dégager
un accès. J’ai les doigts en charpie et le cerveau en marmelade.
Dans un tel état, l’écriture est difficile. Avec un
cerveau en dérangement et les doigts qui inondent le clavier de sang, je vois
rouge. Le rouge, à l’aube n’est pas une couleur qui inspire. Seul le bleu
stimule mon imagination. Malheureusement, issus d’une lignée de roturiers
vivant aux crochets des nobles, je n’ai pas le sang bleu.
Le vie est injuste et ne récompense pas le dur
travail. Une nuit entière à se débattre contre des éléments hostiles, à
affronter de vieux démons, à fuir les évidences et la gratification est une
page blanche taguée de rouge. Le rouge, je ne l’apprécie que lorsqu’il est dans
une bouteille scellée par un bouchon en liège et non en plastique. J’ignorais
que le plastique était une matière renouvelable. Il tue la respiration du vin
et tarit sa poésie. De plus, sauf pour les vins que mon portefeuille rechigne à
m’offrir, les bouchons en plastique brident l’échange verbale entre l’attablé
et l’homme debout :
- Pardon, il me semblerait que votre vin est
bouchonné.
Il est l’heure de réveiller toute la famille. Avant de
passer à l’action, je rebouche la bouteille de pinard, la planque dans l’armoire,
me lave les dents, avale un tube de dentifrice afin que personne ne soupçonne
la présence de ma maîtresse.
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