L’impatience règne en despote dans le cabinet noir d’ancre. Enfermé à double tour, j’attends fébrilement ma libération conditionnelle. Ma liberté est liée à l’aspirateur, qui est lui dépendant du sommeil du gamin. L’enfant roi dort, l’aspirateur est silencieux, je promène mes doigts ensanglantés par le dur labeur d’écrivain de pacotille. Le créateur souffre à chaque accouchement cérébral. La douleur et la création relâchant dans d’autres ports que le mien, je décide de prendre le taureau par les testicules. Je colle donc des punaises sur les touches du clavier, à l’envers évidemment, afin de découvrir les affres de la création. La souffrance est au rendez-vous. L’extrémité des doigts est très sensible. Par contre, la création est brève et forcément éphémère : deux baffes de ma tendre et musclée femme, accompagnées de ce commentaire.
- La prochaine fois t’évitera de taguer les murs avec ton sang d’ancre.
Le teigneux, il ose écrire une deuxième fois ancre à la place d’encre. Des lecteurs écœurés ont cessé la lecture dès la première phrase. D’autres, masochistes et téméraires ont cheminé en évitant les embuches stylistiques et nauséabondes. Leur conclusion fut sans appel : au lieu de perdre son temps à coller des punaises sur les touches du clavier, il aurait dû utiliser de la super glu et coller ses doigts sur le bureau afin de ne pas polluer le web avec des écrits inconsistants.
J’ai encore affaire à des intellos non manuels. Avez-vous déjà essayé d’enduire vos doigts de super glu ? Ce n’est pas possible. Enduire la première main est un exercice aisé. Comment faites-vous pour la seconde ? Comment tenez-vous le tube, sans qu’il ne reste à jamais fixé à vos doigts ?
Je suis un triple idiot ! Il suffit d’étaler la colle sur le bureau préalablement dégraissé et d’y appuyer fermement les doigts.
Quelques lecteurs apparentés à Conan Doyle ont deviné la véritable cause qui a ensanglanté le bout des phalanges.
C’est exact, les punaises ne sont qu’une pure forfanterie. J’ai joué avec un tube de colle.
J’ai connu dans ma vie le noir absolu. Le jour où une ancre m’est tombée sur la caboche.
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