une petite précision s'impose


Ce blog de voyage, conçu pour raconter notre périple en voilier, s’est transformé progressivement en un blog hébergeant des articles hétéroclites. Ils sont les récits d’autres périples, plus cérébraux que physiques.
Ma compagne préfère ce style de voyage. Une préférence extrémiste, je suis enfermé à double tour dans un cabinet noir. Seul un clavier lumineux me permet de communiquer avec le monde extérieur.







dimanche 13 avril 2014

Joyeux anniversaire



- Joyeux  anniversaire Frédéric !
Qu’est-ce que je me marre. Je suis croulé de rire sur l’ordinateur. Je ricane. Je me roule par terre d’hilarité. Je pleure de joie. Je glousse. Je suis tordu de rire. Je pète d’allégresse. Je m’esclaffe. Je souris. Je pouffe. Je caquette. J’hennis. Je braie.
Mais sincèrement, je ne trouve pas cela si génial de prendre un an dans la tronche. A part la sagesse qui est le reflet d’une plus grande difficulté à réfléchir. Prendre un an se traduit par un rabaissement du sol, par des articulations qui grincent comme les roue d’une brouette délaissée, par un porte étendard qui ne porte plus grand-chose, par des poches sous les yeux qui servent de garde-manger, par une mémoire défaillante, par un tremblement des extrémités, par une odeur de rance qui surnage malgré l’utilisation intensive de déodorant, par une démarche claudicante, par une surdité chronique, et surtout par l’âge de la retraite qui recule plus vite que je vieillis.
Cependant je remercie les humbles âmes qui m’ont souhaité un joyeux anniversaire, d’autant plus que j’ignore maintenant la date de ma naissance.

Putréfaction



Le vent vif me purifie le corps. Je suis nu face à la mer, les bras écartés dans le but d’offrir une plus grande surface au souffle purificateur. Les rafales bousculent mon être, les poils sont arrachés par poignées, la peau rougit sous les coups de boutoir, le sexe se rétracte dans sa coquille, les testicules ne sont plus que deux lentilles, le crane s’épile, la bouche s’ouvre, le vent s’engouffre, suit la voie œsophagienne,  dilate l’estomac, gonfle les intestins et  ressort par la seule issue possible en attirant à lui la pourriture nauséabonde qui me parasite.
En me rhabillant je pense à l’effet éphémère de la purification. Deux trois jours suffiront  à la charogne pour coloniser de nouveau mon corps.
Malgré une enveloppe corporelle d’apparence saine, je suis pourri de l’intérieur. La pensée, l’âme, et l’être matériel ne sont qu’un amas de putréfaction.
J’ai beau me laver les dents, faire des lavements, ingurgiter par litre de la Bénédictine, me confesser tous les dimanches matin et les jeudis soir en compagnie des grenouilles de bénitiers, laver la peau avec un gant de crin, me flageller avec une chaine à vélo rouillée, marcher pieds nus sur des braises, sodomiser un pou pédophile, me coiffer avec la raie au milieu,  la pourriture m’envahit le corps. Seul le vent violent arrive temporairement à assainir le Moi et son enveloppe.
Je pue de l’intérieur. Le problème est que je n’arrive pas à contenir la puanteur. Si je n’expose pas mon corps à une tempête, la fétidité s’extériorise par les pores et par les divers orifices que la nature a percés dans mon enveloppe corporelle. Ainsi mon entourage m’évite ou n’accepte ma présence que dans les lieux exposés au courant d’air. Même les mouches à merde me fuient comme la peste.
Même la mort avec sa faux rouillée mais tranchante comme la faux de la mort me fuit comme la mort.
La mort a-t-elle une mort ?