une petite précision s'impose


Ce blog de voyage, conçu pour raconter notre périple en voilier, s’est transformé progressivement en un blog hébergeant des articles hétéroclites. Ils sont les récits d’autres périples, plus cérébraux que physiques.
Ma compagne préfère ce style de voyage. Une préférence extrémiste, je suis enfermé à double tour dans un cabinet noir. Seul un clavier lumineux me permet de communiquer avec le monde extérieur.







lundi 20 octobre 2014

Adulte !



Aujourd’hui, sans condition ni retenue je peux te le souhaiter. Mince! Où ai-je mis mon bloc note ? Ce n’est pas possible, j’ai les neurones qui se diluent et s’évaporent. Quel jour sommes-nous ? Je vois écrit au bas de l’écran 20/10/2014. A quoi servent ces chiffres ? Serait-ce un nouveau logiciel capable de détecter la température afin de savoir si nous ne sommes pas porteur du virus Ebola ? Normalement l’antivirus de l’ordi devrait suffire pour contrer une telle épidémie.
Je suis dans un brouillard complet, agrémenté de graines de céréales. Je suis dans le cirage mais il n’est pas encore étalé sur les chaussures. Ça me rappelle un réveil, un réveil brutal :
Une dame revêtue de blanc me secouait en disant :
-Monsieur, monsieur, réveillez-vous, elle arrive.
J’étais allongé sur une table d’accouchement, je n’accouchais pas, j’étais un homme (il paraît que je le suis toujours). Je me suis arrêté sur le seuil de la salle d’accouchement où effectivement ta mère qui est toujours une femme attendait que tu sortes. Et toi tu attendais que j’arrive. Et moi, j’attendais que tu cries pour arriver. Nous attendions tous. C’est la sage-femme qui débloqué la situation en me forçant à entrer. Ainsi, ta mère consentit à pousser, toi à sortir et moi à attendre.
C’est étonnant d’avoir une telle pensée à six heures du matin, en plus un lundi. Actuellement il est 7h18. Le temps de penser, d’écrire, d’ingurgiter deux cafés et de reconstituer le mental  ont agi sur l’heure. 7h18 !!
18 ? 18 ! C’est l’appel d’urgence des pompiers ? Je l’ai au bout de la langue. 18 fois 1 est égale à dix-huit. Euréka, le souvenir de l’accouchement n’est pas arrivé par hasard. Aujourd’hui ma très grande fille tu as dix-huit ans.
Je te souhaite un happy anniversaire.
 Je vais pouvoir faire la grasse matinée. Je suis maintenant dispensé de préparer tes affaires et de t’amener  à l’école.
Merde ! Je ne peux pas faire la grasse matinée, j’ai trois adorables enfants qui n’ont pas encore dix-huit ans.
Faites des gamins qu’ils disaient !

Bon anniversaire ma fille !

Ton papa qui t’aime.

mercredi 15 octobre 2014

Formation

Antonin n’a plus de concurrence pour vivre son œdipe. Il peut dormir lover contre sa mère sans que le père l’arrache et le ramène dans son lit.
Je viens d’abandonner une nouvelle fois mes enfants, cette fois-ci, le but n’est pas un voyage mais une formation dans la maintenance en marine de plaisance. Et non, je ne serais pas moniteur, ce n’est pas l’allergie à la pédagogie qui m’en empêche, mais la sécheresse de mon imagination : imaginez des élèves assistant aux cours sans entendre des inepties plus décalées que l’enseignant, ils s’ennuieraient.  Donc par respect pour eux, je me dirige vers une voie où ma langue restera dans la poche. Les mains ne supporteront pas le contact poisseux et nauséabond de l’appendice buccal, elles s’échapperont des poches. Pourtant les mains trainent un peu partout, cependant leur odeur est souvent plus supportable qu’une bouche le matin au réveil.
Tout ce que j’espère, c’est qu’elles délireront moins que la langue, sinon il va y avoir de nombreux sous-marin dans la région du havre.
Pour les incultes, un sous-marin est un bateau qui navigue sous l’eau, volontairement ou involontairement.
Rassurez-vous pour l’œdipe, nous nous voyons tous les weekends et le lit de mon fils est très confortable, j’y dors très bien.

dimanche 12 octobre 2014

Je riz brun.



Je rigole, je ris jaune, mais je n’ai pas le béribéri.
Il y des moments où l’envie de cuisiner est absente. Juste une envie de me vautrer dans le canapé en regardant mes petits monstres se chamailler, sans d’ailleurs en comprendre la raison qui est inaccessible au commun des adultes.  Le problème est que j’ai eu la même réaction la veille, et que le repas c'était résumé à des gnocchis industriels et des nuggets de poulets, du moins c’est ce qui est noté sur la boite. J’ai donc du mal à leur resservir un repas tout fait, genre pommes de terre sourire accompagnées de cordons bleus façon Père Dodu. Rempli de culpabilité, je leur cuisine du riz complet.
Le riz complet est mon plat de substitution par excellence. Il s’accommode aussi bien avec  tout, qu’avec rien. Et je suis presque sûr que mes gamins mangent équilibré. « Presque » car il doit bien y avoir quelques pesticides qui trainent par ci par là. Si cela ne tenait qu’à l’intellect, mes garnements en dévoreraient à chaque repas. Mais le dos et les genoux demandent grâce à chaque fois que j’ai la malencontreuse idée de préparer du riz.
Le riz est une denrée instable. Dès qu’il arrive dans l’assiette des petits ogres, il a tendance à prendre la poudre d’escampette en enjambant tout d’abord le rebord de l’assiette pour ensuite se jeter vers le sol. Son errance ne s’arrête pas là. Le riz est un expansionniste. Rien ne l’arrête et il emploie toutes les ruses pour migrer vers toutes les  parties de la maison. Il se cache dans la serviette, et profite d’un moment d’inattention des parents pour ordonner à l’enfant de se lever. Evidemment, le riz en profite pour coloniser le territoire. Il arrive même à se nicher dans les replis des vêtements, qui parfois le soir après la douche, sont des pyjamas.
Ainsi après chaque repas à base de riz, la chasse aux grains commence, et elle est épuisante. Je ne la décrirai pas, j’aurais trop l’impression de la revivre. Je ne demande qu’une seule chose. Qu’un riz génétiquement modifié soit créé afin que ses grains soient indissociables.
Je sais qu’il en existe déjà un, sous la forme d’un riz rond blanc. Cependant je ne peux pas l’utiliser intensivement pour trois raisons :
La première à cause du béribéri.
La deuxième est qu’il colle encore plus au plancher.
La troisième est que je n’aime pas les blancs.

dimanche 5 octobre 2014

"La manif pour tous"



Aujourd’hui, c’est jour de fête. Nous partons en famille à la "manif pour tous ". Les chaussures sont cirées, les socquettes plus blanches que blanches, les habits repassés, le corps récuré et l’âme pure. Avant de  nous lancer dans le combat pour notre juste cause, nous nous rendons à la messe afin de communier. Dans l’église, nous sommes tous fébriles et complices. Toutes les personnes présentes seront de la manif. Il y a même déjà des drapeaux et des banderoles prêtes à être déroulées.
Les plus jeunes ont retrouvés leur camarade de classe de l’école Sainte Bernadette. Pendant que les adultes discutent des derniers préparatifs, les enfants jouent gentiment dans le square attenant à l’église. Les mères veillent à ce que leur progéniture ne tache pas leurs habits de parade.
La grande majorité des participants ira à Paris en train. Nous, nous déplacerons en voiture car nous devons prendre ma mère à Luzarches. Elle désire aussi participer à la " manif pour tous ". Nous regrettons de ne pas accompagner nos amis, d’autant plus que le voyage en train ne sera que liesse et ferveur.

Après une rapide collation, nous partons. Nous devons être à porte Dauphine avant treize heures.
Durant la collation, ma plus jeune fille m’a interpelé :
- Papa vous allez manifester parce qu’un français a été tué en Algérie ?
- Mais non ma fille, nous voulons que tous les enfants aient un papa et une maman.
 Ensuite le plus grand m’a questionné sur le massacre des populations civiles en Irak et en Syrie.
J’ai exprimé mon désaccord et mon dégout sur de tels actes.

 En arrivant sur Paris, nous surplombons un camp de tentes, un bidonville occidental. La plus jeune qui a oublié de mettre sa langue dans sa poche dit :
- On va manifester pour eux ?
- Mais non, nous allons manifester pour que tous les enfants soient respectés.
 Je ne sais pas comment lui expliquer que nous luttons contre la gestation pour autrui.
- Alors nous manifestons pour que les familles qui traversent la méditerranée ne meurent pas noyées, répond-elle.
Pour avoir la paix, je réponds oui en me promettant de n’écouter les informations que pendant son absence.
Je regrette de plus en plus d’avoir pris la voiture, surtout que le grand m’asticote sur La GPA. Devant les petits, je ne sais pas comment argumenter, ils ne connaissent pas encore les mystères de la  procréation naturelle. Je tiens à préserver leur innocence.
J’aurais dû le laisser à l’institution du Saint-Esprit au lieu de l’inscrire dans un lycée laïc. Il a des idées quasiment révolutionnaires depuis qu’il fréquente cet établissement. Il nous répond que les armes ne sont pas naturelles et qu’elles font des ravages. Que mourir de faim est surement naturel, car il n’a pas connaissance de mouvement de masse pour tenter de stopper la misère partout où elle est.
Les jeunes ne connaissent rien à la vie, confondent et mélangent tout, et en plus ils se permettent de nous donner des leçons.
Je réponds que nous ne pouvons pas lutter contre toute la misère qu’il y a dans le monde. Que ces pays sont responsables de leur avenir et que nous avons déjà nos propres problèmes à régler.
Promis juré, il fera sa terminale S dans le privé.

Avant de sortir de la voiture, il m’assène le coup de grâce :
- Je ne comprends pas votre démarche. Je peux comprendre que vous soyez contre  la G.P.A. et la procréation médicalement assistée, mais c’est quand même donner la vie. Alors que la prolifération des armes, la famine dans le monde, les massacres de populations, le capitalisme sauvage, l’augmentation de la pauvreté suppriment des vies. Sincèrement, même si le sujet a son importance, je considère qu’il est dérisoire par rapport à de nombreux faits d’actualité. Je considère que la chrétienté a d’autres combats à mener. Votre manifestation va à l’encontre de vos valeurs.
Vous préférez la mort à la vie !

Promis juré, je ne mettrai plus mes gamins dans le laïc.

samedi 4 octobre 2014

Nouvelle vie.



Hier, la confirmation d’une probable nouvelle vie est arrivée. La semaine prochaine, je commence une formation de neuf mois. Je touche du bois, croise les doigts et m’abstiens de picoler la nuit afin que la lourdeur administrative ne s’assoit pas dessus.
A cinquante-six ans, j’entame une quatrième période de vie active. Quand vais-je m’arrêter ? Seule la mort décidera. Les périodes ont tendance à se rétrécir. La première a duré plus de 25 ans, la vie moyenne d’un cheval. Ensuite j’ai pris mes RTT pendant plus ou moins huit ans. Ils ont servi à la reproduction, à l’éducation des gamins et aussi à des tentatives d’écriture. Puis j’ai  plongé une nouvelle fois dans la vie active, sous la forme d’un réparateur de machines à café. Une allergie à la lecture du marc de café, plus un amour fou pour mon DRH, m’ont désolidarisé au bout de deux ans de la confrérie de la distribution automatique. Je ne regrette rien, ce métier manque de poésie. Mais les doux mots, fins et perspicaces de mon DRH sur le tableau noir me manqueront.
Maintenant, je m’oriente vers le nautisme.
Le problème est que la formation est au bord de la mer et que nous habitons à l’intérieur des terres. J’ai deux solutions :
Soit attendre la fonte des glaces et commencer ma formation lorsque la mer léchera les pieds de mon appartement, soit migrer en abandonnant lâchement ma femme et mes jeunes terreurs. Je choisis l’abandon.
Ce sera seulement un abandon de milieu de semaine, je serai présent le weekend. Pauvre femme ! Seule à gérer ses monstres carnivores. Nous n’osons plus prendre de nounou à cause de l’aventure qui est arrivée à l’une d’elle. Voir l’article: les dangers du  baby-sitting. Mais l’amant de ma femme, mon éditeur, qui ne m’a jamais édité, est prêt à nous aider, ouf !
Neuf mois de gestation et j’accouche d’un diplôme. Ce sera mon cinquième gamin. Malheureusement, avec les nouvelles réformes, je ne toucherai probablement pas la prime à la naissance. C’est dégueulasse, si nous ne pouvons plus gagner de l’argent grâce aux allocs, il est temps de se faire enlever les « coucougnettes ». Pour l’instant je les garde, elles peuvent me servir comme aide à la flottabilité en cas de naufrage.


Une idée : si je faisais de nombreux gamins avec des femmes différentes, il me serait possible de toucher plein pot les primes de naissance.
 Donc je n'aurais plus besoin de formation.