une petite précision s'impose


Ce blog de voyage, conçu pour raconter notre périple en voilier, s’est transformé progressivement en un blog hébergeant des articles hétéroclites. Ils sont les récits d’autres périples, plus cérébraux que physiques.
Ma compagne préfère ce style de voyage. Une préférence extrémiste, je suis enfermé à double tour dans un cabinet noir. Seul un clavier lumineux me permet de communiquer avec le monde extérieur.







Un petit bonus pour les amoureux des chevaux



- Bonjour ! Je ne sais comment me présenter à vous. Mon histoire est invraisemblable et incroyable. Elle pourrait remettre en cause toutes les théories sur l’évolution de l’intelligence humaine, ou, confirmer la théorie de la réincarnation de l’homme chez l’animal.







Je n’ai toujours pas de réponse au « pourquoi » de mon existence. Vous allez me répondre que toutes personnes se posent ces questions un jour dans sa vie. D’accord. Mais sincèrement mon existence est spéciale. Je ne vais pas tourner autour du pot pendant trois heures, ou plus ou moins une cinquantaine de pages, cela dépend de votre vitesse de lecture. Je suis un…




Je n’y arrive pas. Je n’ai pas le courage de me définir. Un seul mot suffit à m’identifier. Je préfère vous laissez deviner.




Je suis un quadrupède, ongulé, non ruminant. Je suis considéré comme un animal noble, avez-vous deviné ? Pas tous ! J’ai été détrôné par la voiture. Bon maintenant je peux lâcher le morceau, pas de carotte bien sûr, celui-là je le garde pour moi. Je suis un cheval. Pour être plus précis : un coup je suis un cheval et le lendemain un poney ! Etonnant, non ! Je ne suis pas à géométrie variable mais je mesure un mètre quarante sept ou quarante huit. Quand on sait que la limite poney - cheval est un mètre quarante sept, vous comprenez que, suivant la précision de la mesure, je passe d’une catégorie à une autre.




Je suis un hongre. Et oui, je n’ai plus les petites balles qui permettent de faire des bébés à l’amour de sa vie. Je suis gris, presque blanc maintenant. Eh oui ! Je suis un vieillard, vingt sept ans. Pas mal pour un cheval. Je suis encore capable de galoper dans la grande pâture qui jouxte les boxes. Ne vous inquiétez pas je ne suis pas tout seul, j’ai plein de copains et de copines, des retraités comme moi, et quelques poulains et jeunes qui terminent leur croissance.




Pour l’instant, il n’y a rien d’étonnant. Etre un cheval ou un poney, rien de plus commun, n’est-ce pas ? Cependant je possède une qualité, non ! Le mot qualité ne convient pas. Un peu de vantardise : je suis intelligent, pas comme le premier de la classe, mais pas mal, et fréquemment beaucoup plus que certains moniteurs d’équitation que j’ai croisés dans ma vie.




Et oui ! Je comprends tout ce que vous dites ! Je sais même lire. Là, s’arrête nos ressemblances. Je ne sais ni écrire, ni parler. Ma morphologie ne me permet pas de tenir un stylo, ni d’actionner ma langue et ma mâchoire de façon à articuler des voyelles et des syllabes. La seule fois où j’ai essayé, les dirigeants du club qui m’hébergeaient, contre travail évidemment, ont cru que le monstre du Loch Ness avait élu domicile dans leur écurie. Quand je dis que je ne sais pas écrire, je me sous estime. Je suis capable de tracer des lettres et des chiffres sur du sable. Mais cela est épuisant. J’ai beaucoup de difficulté à remuer ma jambe ou mon antérieur gauche, je suis un gaucher. Ecarter ma jambe et la ramener ne sont pas des gestes naturels chez le poney. Bien sûr je peux écrire avec mon bout de nez, mais manger, ensuite, du sable toute la journée n’est pas agréable....




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Vous vous posez la question : comment ai-je fait pour raconter ma vie si je ne sais pas écrire ni parler. Connaissez-vous le morse ? C’est un langage qui traduit les lettres de l’alphabet par des signaux lumineux ou sonores.







Exemple : ... --- ...




je traduis : SOS




Si parfois, en vous promenant dans les écuries, vous entendez des chevaux taper dans leurs portes ou gratter le sol avec leur sabot, écoutez bien, certains connaissent le morse. Je leur ai appris. Ils ne savent pas faire une phrase mais des mots tels que : manger, faim, soif, sortir, carotte etc. …Au sujet de la carotte, privilégiez-là au substitut de friandises qui est vendu dans le commerce. Ces bonbons aromatisés, sincèrement je n’aime pas ça. Evidemment lorsqu’il n’y a pas autre chose, je les mange. Rien ne vaut une belle carotte ou une pomme bien juteuse.




J’en reviens à mon langage. Celui-ci m’a permis d’écrire ce livre avec l’aide de mon hôte qui assure ma retraite. Cette personne est la seule à connaître mes capacités exceptionnelles. Nous nous connaissons depuis une quinzaine d’années. C’est une femme répondant au prénom de Simone. Pourquoi la seule ? Parce que les choses de la vie nous ont rapproché, et que je lui fais totalement confiance. Elle est discrète et tient parole. Qualité rare chez un humain. Avec elle, j’ai l’esprit serein. Je suis certain qu’elle n’ira pas crier sur tous les toits que je suis animal doué d’une intelligence au dessus de la moyenne.




Je ne souhaite pas que cela se sache. Connaissant la curiosité humaine, je ne tiens pas à finir mes jours dans un laboratoire pour être disséqué, tout cela pour assouvir votre soif de connaissance. Je ne parle pas de vous, humbles cavaliers, qui m’avez chevauché et découvert les joies de l’équitation grâce à ma grande gentillesse. Excusez-moi, je me lance des fleurs. Mais je pense à toutes ces personnes qui font commerce de nos capacités athlétiques et autres qualités. Ils profitent fréquemment de l’ignorance de leur semblable et se remplissent les poches.




Donc lorsque vous lirez ces lignes je serai probablement décédé. Rassurez vous, ça sera de mort naturelle. Si par hasard je suis encore en vie, vous ne pourrez pas me voir car mon lieu de résidence restera secret. Mais si un jour, vous croisez un poney, un grand, avec des lunettes noires et un foulard autour de la tête, cela sera peut-être moi, me promenant incognito telle une star.




Entre deux carottes, quelques brins d’herbe bien grasse, nous sommes aux printemps, je dicte à mon ami mes mémoires. Simone est assise à une table dans un petit pré. Nous sommes seuls. Mes camarades batifolent dans une autre pâture. Ils sont trop coquins et viennent constamment me déranger, soit pour me voler mes carottes, soit pour jouer avec moi, ou me gratter à la base de l’encolure. Hum ! J’adore. Bref leur présence m’empêche de me concentrer et de dicter à Simone mes mémoires. Pour cela, Simone m’a procuré un seau en métal. Elle le pose sur l’herbe, à l’envers, et moi du bout du pied je tape dessus :

- . ---… etc.…

Elle retranscrit lettre après lettre, puis elle me lit le mot. Si je suis d’accord, je remue la tête de haut en bas pour dire oui, comme vous. Pour dire non, vous connaissez donc la réponse. Bien sûr lorsqu’il pleut nous nous abritons dans les écuries. Malheureusement lorsque le froid est trop vif, nous sommes obligés de cesser. Simone ne supporte pas le froid, elle est frileuse comme vous tous.




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Le texte que vous lisez n’est pas remanié, Simone ne l’a point rectifié, elle a seulement corrigé les fautes d’orthographe. Si quelques-unes lui ont échappé, ne lui dites rien, elle est susceptible.







Oh la ! Je viens de me faire disputer, gentiment bien sûr. Elle me signale que si je maîtrisais mieux l’orthographe, elle aurait moins de travail de correction.




J’ai un petit problème : je ne peux pas dire du mal de Simone, car c’est elle qui écrit. D’ailleurs elle me répond :




- Dire du mal de moi ! Ce n’est pas possible car je suis une fille sans défaut, que des qualités.




Quelle baratineuse ! A force de me fréquenter, elle croit que mes qualités sont les siennes.




Elle dit :




- Si tu continues comme cela, j’arrête d’écrire et te supprime ta ration de carotte.




Non ! Pas touche à mes carottes. Je suis embêté, car elle ne me monte plus dessus, elle respecte mon grand âge. Nous nous baladons toujours, mais à pied, tous les deux, main dans la main. J’affabule un peu, nous sommes côte à côte, je n’ai pas de licol, je suis libre comme l’air. Pour autant je n’en profite pas pour vadrouiller à droite et à gauche. Je suis un vieillard. Et avez-vous déjà vu vos grands-parents gambader comme des cabris. Non ! Moi c’est pareil. Ne plus l’avoir sur mon dos m’ennuie un peu, je ne peux plus lui dire « si tu me donnes pas de carottes, je te mets à terre. »




Nous nous disputons rarement. Elle ne me punit jamais et moi non plus ; nous sommes deux amis. Deux amis ne se punissent pas, n’est-ce pas ?




Nous avons quelquefois des différends, ils sont d’ordre philosophique, et aussi parfois nous ne sommes pas d’accord sur les pâtures à occuper ? Normal, je sais mieux qu’elle l’endroit où l’herbe est la meilleure.




Maintenant que nous avons fait connaissance, je vais vous raconter ma vie de cheval… ou de poney - cela dépend si j’ai des talons hauts !

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Je devais avoir quatre ans, lorsque je m’aperçus que je comprenais le langage humain, en l’occurrence le français. Je ne suis pas bilingue, ni trilingue. C’était un matin, un palefrenier curait ma stalle. Il me dit :


- Tournez !


Ordre habituel, j’obtempérais de suite, me déplaçais de l’autre côté de la stalle afin qu’il puisse finir son travail.


Vous me direz qu’il n’y a là rien d’extraordinaire. Tous les chevaux, au bout de quelques mois dans une écurie, finissent par obéir à cette demande. La chose la plus étonnante est que j’ai compris le reste de la conversation.


Je séjournais dans une grande écurie parisienne, dans la banlieue nord, près de la porte de la Chapelle. Avec mes congénères, nous étions dans des stalles. Les stalles sont de petits espaces où nous sommes attachés face à un mur. Nous avions juste la place pour nous coucher. Se rouler ? Il en était hors de question. Ma stalle se situait dans la troisième allée à droite en partant du club house. Les allées étaient composées de vingt stalles de chaque côté. Ce qui représentait une quarantaine de chevaux par allées. Dans ce club, nous étions approximativement cent vingt.


Vous comprenez que notre vie était agréable, avoir un mur en face de soi toute la journée, sympa non ! Moi ça allait. J’étais jeune, pas trop grand, donc, pour apercevoir les personnes qui passaient dans le couloir central, je pouvais tourner la tête sans difficulté. Mais les chevaux plus âgés avaient du mal et finissaient par attraper un torticolis. Rassurez-vous ! Les stalles ont pratiquement disparu aujourd’hui. Quelques années plus tard je suis retourné dans ce club, lors d’un concours. Les stalles étaient remplacées par de petits boxes. Ce n’était pas encore le paradis, mais que voulez-vous, nous, les chevaux, nous n’avons pas notre mot à dire !


J’en reviens à ma compréhension de votre langue.


Les palefreniers étaient deux, un pour chaque rangée de stalles. Ils avançaient en parallèle et remplissaient le même chariot. Pour passer le temps, ils discutaient.


- Nom de dieu, celui-là est une vraie machine à chier !


Je tournais la tête, étonné de comprendre ce qu’il disait, et surtout pour savoir si le qualificatif « machine à chier » m’était destiné. Ouf ! Le gentil nom était affecté à mon voisin de postérieur. Oui, j’avais trois voisins : un à droite, un à gauche, et un derrière moi de l’autre côté de l’allée. C’était un gros pépère qui passait son temps à se goinfrer de paille. Un bon copain.


L’autre palefrenier lui répondit :


- Si tu veux être tranquille, tu lui mets un bouchon dans le c… !


Je suis dans l’obligation de ne pas retranscrire le mot dans son intégralité, et je pense que je serai constamment obligé de le faire, car les hommes de cheval ont un langage ordurier. Je ne sais pas si cela est le fait de nous fréquenter, nous qui sommes la plus belle conquête de l’homme, mais nous ne pouvons pas avoir une influence aussi néfaste sur nos maîtres.


D’entendre ces phrases m’étonnait un peu, je dois l’avouer. Je n’eus pas le temps de réfléchir longtemps, je sentis un coup sur ma croupe et une voix ferme :


- T’arrête de bouger !


Sans réaliser, préoccupé par mes réflexions, j’avais déplacé mon postérieur et coincé le palefrenier contre le mur. Ce matin-là, il était de bonne humeur, donc il ne me corrigea pas. Je me serais le plus possible contre la paroi, le regardais en prenant un air contrit, avec mes oreilles bien en avant de façon à présenter mes excuses. Il me dit :


- Patience ! La paille arrive.


Il n’avait rien compris. Ce ne fut que le début d’une longue incompréhension entre les humains et moi. Je ne me formalisais que peu de temps, la paille arriva et je me jetais dessus et oubliais momentanément mes préoccupations.


La journée était réglée comme du papier à musique. Sept heures : le petit déjeuner nous était offert, il était constitué de granulés. Ensuite, un jour sur deux curages des boxes. Puis distribution de paille. Le midi : déjeuner, un menu très simple : granulés. Puis en fin d’après-midi ou en début de soirée ou le soir, j’ai toujours du mal à situer ces espaces temps sur une échelle horaires, nous avions droit à notre dîner, cette fois-ci, exceptionnellement composé de : granulés.


J’adorais ces moments où l’homme était à notre service ; les voir suer sous le poids des fourches de fumier. Mon copain de postérieurs qui s’appelait Eclair prenait un malin plaisir à se soulager un maximum. Ensuite, il piétinait de ses membres arrière le crottin afin de le compacter. Je revois encore la tête du garçon d’écurie lorsqu’il plantait sa fourche dans la masse ainsi formée !


J’adorais aussi les moments durant lesquels, l’hiver, les abreuvoirs gelaient. Je les voyais arriver le matin, encore endormis, tremblotant sous le froid glacial. Ils peinaient à transporter le seau de vingt litres d’eau. Mon pote Eclair prenait un malin plaisir à le renverser à la première gorgée.


J’adorais le moment du pansage, mais mon voisin de droite, pur-sang anglais, le supportait difficilement. Les étrilles en caoutchouc étaient encore rares à cette époque, nous avions droit aux grosses étrilles en fer. Le pauvre il souffrait le martyr. A force de souffrir, il avait trouvé la parade. Lorsqu’il voyait sortir d’un sac une étrille en fer, il tournait la tête violemment, baissait les oreilles montrait les dents, levait un postérieur, ce qui avait de quoi intimider un cavalier peu aguerri.


Notre hébergement n’était pas une donation humaine. En contrepartie, nous devions travailler. Notre travail consistait à transporter des personnes sur notre dos. Théoriquement, lorsque vous transportez un individu, vous vous déplacez d’un point à un autre. Ici non, nous tournions en rond. Je me souviens la première fois que je me suis retrouvé dans un lieu que vous appelez « manège ». A la fin du premier tour, je me suis arrêté, je considérais que nous étions arrivés. La personne au milieu n’était pas du même avis que moi et il me l’a rappelé par un coup violent de chambrière sur la croupe. Je n’ai pas cherché à discuter, cet individu avait l’air borné. Il n’aurait pas compris ma conception rationnelle du transport. Donc j’ai refait un deuxième tour, et me suis arrêté une nouvelle fois devant la porte. Je ressenti une deuxième douleur sur mes fesses, je n’hésitais pas, je galopais et ne m’arrêtais plus. J’en profitais pour me dérouiller les jambes. Le plus rigolo est que l’individu s’est mis à parler d’une voix douce :


Ooh ooh !


Plusieurs fois d’affiler. Une vraie girouette, un coup je dois avancer, et trois minutes après je dois m’arrêter. Je reconnais que je galopais un peu vite. Il devait avoir peur que je dérape dans un virage. Personnellement, je ne m’inquiétais pas. Mes premières années, j’avais vécu dans une ferme équestre dans les monts d’Auvergne. Je me souviens encore des galopades avec mes potes dans la neige. Plus glissant tu ne trouves pas. La dernière année, après mon débourrage et avant mon arrivée dans ces barres d’HLM, j’avais participé à quelques randonnées. En Auvergne, il y a plus de cailloux que de sable. Ce n’est pas pour me vanter mais j’ai le pied sûr.


Je répondis légèrement à l’ordre de ralentir, je ralentis le galop et décidais de galoper sans m’arrêtez. J’avais de l’endurance. Mon arrivée en ces lieux était récente, deux jours. Je n’avais pas encore participé à des reprises. J’avais un besoin de me défouler.


Le monsieur était tout rouge, il essayait de me stopper en se plaçant sur ma trajectoire. Je l’évitais sans accélérer, je pris la diagonale et en profitait pour travailler mon galop à droite qui était plus laborieux.


Se voyant impuissant, il interpella un collègue et lui expliqua son problème qui en apparence était moi. Ce dernier répondit :


- Sors du manège ! Lorsqu’il en aura marre, il s’arrêtera. A la vitesse à laquelle il galope, il peut tenir une petite heure sans problème. Je te parie que quand il sera seul, il s’arrêtera.


Mon individu écouta son collègue. J’avais compris le sens de la phrase. Je suis assez contrariant de nature. Il avait parié que je m’arrêterai. J’allais lui prouver le contraire. Je continuais donc de galoper. Mais galoper seul, sans spectateur, sans camarade, et en tournant en rond, pour être précis en rectangle avec des bords arrondis, était frustrant. Je m’ennuyais rapidement. Je n’avais pas parié. Alors de gagner ou de perdre, je m’en battais comme de mes derniers fers. Je profitais de ma liberté toute relative pour me rouler et découvrir les alentours en regardant par la porte du manège.


Ce qui me choqua était l’absence d’herbe. Pas un pré aux alentours, des étendus de sable, des carrières, avec des obstacles dessus, d’autres avec des lettres. Si, juste face à moi, il y avait un paddock avec de la pelouse fraîchement tondue.


- Elle ne doit pas être souvent broutée !


De l’autre côté de cette étendue, des bâtiments qui doivent être les bureaux et le club house. En prolongement du bâtiment, sur la droite, se trouvaient les écuries. Pile poil sur ma droite, deux autres manèges, sur ma gauche, un troisième, plus le mien : quatre. J’eus un coup de cafard. Je regrettais ma ferme équestre et ces cinq hectares de pâture. Je voulais encore galoper dans les prés avec mes potes, me rouler dans la poussière ou dans la boue, humer la senteur du purin fraîchement sorti de l’étable. L’individu, me voyant stoppé, me récupéra et me ramena dans ma stalle. J’avais le moral à ras les pâquerettes.


Me retrouver face au mur m’acheva. Une surface qui devait être blanche dans un passé fort lointain, à droite un abreuvoir automatique, à gauche une mangeoire, au milieu un anneau dans la laquelle coulissait ma longe, symbole de mon emprisonnement. Il y avait quelques graffitis, sculptés par mes prédécesseurs. Voilà mon environnement. J’y passais entre vingt heures et vingt-deux heures par jour. Imaginez-vous ! Vivre dans une armoire où vous avez juste la place de vous allonger, sincèrement je pense que votre psychisme ne résisterait pas longtemps. Lorsque je me suis retrouvé face à ce mur, j’étais dans un tel état, que je pensais ne pas pouvoir y survivre.

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.


Ce sont mes camarades de stalles qui m’aidèrent à garder la tête hors de l’eau. C’était déjà de vieux routiers et routiniers. A ma gauche, un troisième voisin me réconforta de suite :


- Ne t’inquiète pas, les premiers jours c’est toujours dur. Surtout pour des petits jeunes comme toi qui n’ont connu que de grands espaces.


Sa phrase me fit plus de mal que de bien. Elle provoqua un nouveau retour en arrière, un flash-back, c’est l’expression que vous employez. Une tristesse m’envahit. Elle en coupa la force qui me soutenait, je m’écroulais au sol et m’agitais dans tous les sens de colère. Mon voisin de gauche qui s’appelait Uranus me cria :


- Ne t’agite pas comme ça, ils vont croire que tu as des coliques, et tu vas avoir droit à une piqûre !


Je ne tenais pas à recevoir une grosse aiguille au travers de ma veine. Je me calmais aussitôt, me relevais. Cependant j’étais toujours cassé. Mon voisin continua sa conversation.


- Tu vas bientôt participer à des cours, tu verras, il y a, en général, une bonne ambiance.


Je savais que je commençais ce soir. J’avais entendu les moniteurs discutés entre eux. Je débuterai dans une reprise de cavaliers ayant un niveau moyen. Ils m’avaient classé dans la catégorie des chevaux calmes et gentils.


Uranus me raconta sa vie. Pendant sa narration je ne pensais à rien d’autre.


Il avait vécu dans un élevage de trotteurs. Ses deux premières années avaient été idylliques. Dans l’élevage de chevaux de sport, surtout dans le milieu des courses, les poulains sont choyés et protégés car ils représentent une certaine somme d’argent. L’homme ne connaît pas encore ses compétences physiques en matière de vitesse ; ni sa solidité psychologique. Dans ces élevages, tout poulain est potentiellement un futur crack. Cette vie au paradis est de courte durée. Dès l’âge de deux ans, le dur travail d’athlète commence. Pour le trotteur, ce travail consiste à l’apprentissage de l’attelage. Je ne peux pas affirmer que le dressage se déroulait dans le calme, la douceur et la psychologie animale.


Les échos et les narrations faites par mes collègues trotteurs n’étaient jamais flatteurs pour vous les humains. Je reconnais que certains en avaient un excellent souvenir, mais ils étaient aussi rares que des brins d’herbe dans une carrière.


Le problème dans le milieu des courses, et plus largement dans le milieu équestre, est la rentabilité. Nous devons le plus rapidement possible rapporter de l’argent. Vous considérez cela normal, vous aussi vous travailler pour pouvoir subvenir à vos besoins. Personnellement je n’ai rien contre le travail, dans le monde économique dans lequel nous vivons, si nous voulons exister, nous devons participer à la vie économique et être rentable. Je ne suis pas contre ce principe. Le profit à court terme, j’ai plus de mal. Malheureusement, il est votre mode d’évolution préféré. Je pense que c’est atavique chez vous. Depuis que vous êtes passés de victimes à prédateurs, vous avez petit à petit modifiés l’éco système. Et maintenant nous en sommes au réchauffement de l’atmosphère. Je sais que des humains luttent contre le profit aux dépens de l’environnement. Cependant il est malheureux que les personnes qui dirigent économiquement notre monde n’aient pas conscience que leurs visions étroites amènent le monde à sa perte.


J’en reviens à mon ami Uranus. Le débourrage qui est le tout premier dressage du cheval c’est très mal passé. Il n’a pas eu de chance. Pris en tenaille entre son propriétaire qui payait une pension conséquente par mois et l’entraîneur qui avait besoin d’argent pour payer ses charges sociales et autres charges de fonctionnement, il devait être opérationnel de suite. Le débourrage a été trop rapide. Uranus n’a pas eu le temps d’acquérir de la confiance envers son entraîneur. Pourtant lorsque nous avons confiance en vous, nous sommes capables de nous jeter dans les flammes si cela est votre désir. De toutes petites flammes, il ne faut pas pousser pépère dans les orties.


Donc mon pauvre Uranus a pété un câble dès la première course. Il a galopé toute la course, lui qui n’avait jamais galopé de sa vie. Pour les novices de l’équitation, le trotteur français est issu de croisements qui ont abouti à une morphologie interdisant la pratique du galop. Du moins presque. Chasser le naturel il revient au galop !


Mon pote a eu une dernière chance et ce fut sa dernière course. Il avait récidivé. A votre avis que se passe-t-il dans ces cas-là ? A l’époque, il n’y avait pas d’associations qui replaçaient les chevaux de course. La valeur vénale d’un cheval de réforme était le prix de la viande. Ainsi leur destinée était toute tracée. Finir dans une assiette ou devenir un crack. Le coup de l’assiette je l’ai appris plus tard, grâce à ma compréhension de votre langage. Mes congénères ne le savaient pas et ne le savent toujours pas. L’ironie est que le profit à court terme nous sauve quelque fois la vie. Lorsque le propriétaire veut se débarrasser de son cheval qui n’est pas apte à concourir des courses, il fait appel à un intermédiaire, le marchand de chevaux, appelé autrefois le maquignon. Ce dernier essayera de placer le cheval en dépôt vente dans un club. Si, celui-ci est capable d’assumer son travail quotidien dans le calme et la sécurité, il a des chances d’être acheté par le club ou un cavalier. Le marchand y gagne car il le revend plus cher que le prix du « couteau ».


Uranus a suivi ce cursus. Cependant il ne sait pas qu’il a échappé de peu à votre assiette. Je sais, vous, cavaliers, vous êtes un nombre insignifiant à nous consommer, mais j’en connais. Ne vous inquiétez pas, je me suis défoulé sur eux. Par quelques cabrioles et autres facéties, je les ai mis à terre.






Après cette conversation, mon moral avait repris de l’altitude. Le soir arriva avec ses reprises. Je pris ainsi contact avec mon premier cavalier. C’était un jeune homme, le plus téméraire de la reprise. Les enseignants privilégient, en général, les cavaliers les plus aguerris pour nos premiers cours. Bien que nous soyons testés, il arrive parfois que nous réagissions différemment lorsque nous nous retrouvions en groupe.


Il était accompagné du moniteur. Il me présenta et me décrivit. Un bon point pour lui ! Combien de fois j’ai vu des enseignants lâcher des gamins avec des chevaux nouvellement arrivés. Le moniteur nous quitta afin de s’occuper d’élèves en difficulté. Il n’oublia pas de préciser :


- Si tu as besoin d’un coup de main, n’hésite pas à m’appeler.


Le jeune homme me caressa la croupe et me poussa légèrement afin d’entrer. Je le regardais faire, les oreilles bien en avant, étonné. Pour la première fois, un petit être humain allait me chevaucher. Les seuls cavaliers que j’avais eus étaient des randonneurs adultes. Il me parla :


- J’aime bien les chevaux gris, par contre tu es un peu petit.


J’aurais pu lui répondre :


- Petit par la taille oui ! Mais grand par l’intelligence !


Je m’abstins, ne pouvant répondre.


Il me pansa correctement, j’eus de la chance, il avait une étrille en caoutchouc. Mon voisin de droite, le pur-sang, râlait. Sa cavalière utilisait un engin de torture, il se pliait dans tous les sens, donnant des coups de postérieur dans le vide, claquant des dents. La petite demoiselle ne s’en laissait pas compter, d’une claque vigoureuse sur l’encolure, elle lui rappela qui était le maître. Il cessa, non sans coucher ses oreilles pour manifester son désaccord. Sa cavalière consciente de son allergie aux métaux ferreux proposa un échange à mon cavalier. Il accepta de suite. Le pur-sang apprécia. L’étrille en fer atterrit sur ma peau, je le supportais sans problème, j’étais plus rustique que lui.


Je fus sellé en un tour de main mais il y eut un petit problème : la sangle était trop petite. L’enseignant le résolut. Ensuite les cavaliers reçurent l’ordre de se diriger vers le manège.


J’avais le trac, j’appréhendais. Mes voisins m’avaient expliqué grosso modo le déroulement d’un cours. Il n’avait pu être plus précis. Suivant les moniteurs et le thème de la reprise, le travail changeait. Le seul conseil important était d’obéir à l’ordre du cavalier. Mon camarade de postérieur Eclair n’était pas tout à fait de cet avis. Il était le seul, je décidais donc d’écouter les autres.


Mon appréhension me démotiva. Mon cavalier peina pour rejoindre le manège. Nous arrivâmes bons derniers. Il s’arrêta sur la ligne du milieu. A ma droite se trouvait Eclair. Je vis son profil pour la première fois, je n’avais jusqu'à maintenant aperçu que son postérieur. Il ne tournait jamais la tête, trop occupé à se goinfrer de paille. Même pour répondre à mes questions il gardait son nez enfoui dans la paille. Il avait un chanfrein busqué, avec une belle liste. Il avait l’air d’un chenapan. L’avenir me confirma qu’il assumait bien son rôle. À ma gauche le pur-sang surnommé Socrate. Je reconnais qu’il prenait la vie avec philosophie. Le moniteur vérifia notre harnachement (il était vraiment consciencieux) puis lorsque tout fut parfait, nous reçûmes l’ordre de nous mettre à cheval. Pas nous ! Les cavaliers. Le fait de comprendre le langage, je croyais, au début, que les ordres m’étaient destinés. Mon cavalier monta à cheval en souplesse sans me rentrer la pointe de pieds dans les flancs, sans s’accrocher aux rênes et sans saisir la selle avec les deux mains. Pour ma première reprise, le moniteur m’avait affecté un cavalier respectueux.


Pour mon voisin de droite, ce fut une autre histoire. Le responsable de la difficulté était lui et non son cavalier qui essayait de s’appliquer. Lorsqu’il mettait le pied à l’étrier, Eclair avançait. Le cavalier pour le contrer ajustait plus sévèrement ses rênes. Eclair baissait l’encolure et arrachait les rênes. Le manège ne dura pas longtemps. L’enseignant vint, tint fermement la tête d’Eclair et le cavalier put enfin monter dessus. Son comportement me laissa perplexe. Je lui demandais quelles étaient les raisons de son comportement. Il m’expliqua de suite.


- Les reprises durent toujours le même temps. Si je gagne cinq minutes au montoir, c’est cinq minutes de moins à bosser.


Notre notion du temps est différente de la vôtre. Nous ne divisons pas notre temps en minutes et en heures. Cependant nous sommes conscients de l’heure des repas, du dépassement de temps d’une reprise etc. Donc pour une meilleure compréhension, je parle de minutes et d’heures. J’ai adapté le discours d’Eclair. Je reprends :


- Avec ce moniteur, cela ne marche pas. Il me tient systématiquement. Cependant j’essaie à chaque fois. Une minute de gagner, c’est toujours ça de pris. Dans un autre cours, avec un autre enseignant, mon stratagème à cent pour cent de réussite. Sa pédagogie est la recherche de l’autonomie du cavalier. Avec moi, le cavalier est autonome, mais avec ses jambes ! Une fois j’ai grappillé un demi-heure de cours. Cool n’est-ce pas ? Je sais, c’est vache pour le cavalier. Ils n’ont qu’à changer de moniteur.


Je ne trouvais pas très sympathique le comportement de mon collègue. J’appris par la suite qu’il était taquin, mais il n’avait jamais provoqué de chutes, du moins chez les cavaliers débutants.


Un léger picotement aux fesses me tira de ma rêverie. Je n’avais pas prêté attention aux ordres de l’enseignant, donc par rebond aux actions de jambes de mon cavalier. Un petit coup de cravache m’avait ramené à la réalité.


Je me retrouvais à marcher derrière Eclair qui ne se gênait pas de lâcher des gaz. Je n’appréciais pas, j’étais le seul. Les cavaliers surtout les plus jeunes riaient. Le moniteur lui dit :


- Gardes tes gaz, ils te seront utile pour galoper.


Nouvelle hilarité chez les élèves, et chez moi aussi. Eclair ne comprenait pas cet accès de joie. Comme tous ses congénères, il est hermétique à votre langage.


Un copain derrière moi, que je ne connaissais pas encore, profita d’un moment d’inattention pour me mordre les fesses. Il était allergique aux nouveaux arrivants. Je n’hésitais pas, je levais mes deux postérieurs et lui lattait violement le poitrail. Heureusement que je n’étais pas ferré. L’agresseur, surpris par ma réaction, fit demi-tour et traversa le manège au galop. Le cavalier de cette monture ne suivit pas la trajectoire imposée et improvisée par son cheval. Il y eut une séparation de corps et il finit par atterrir dans la sciure ; heureusement sans mal. Le mien, sous l’élévation énergique de ma croupe, glissa sur mon encolure. Je la relevais et le replaçais en selle.


Il y eut un peu de cacophonie dans la reprise. Le moniteur demanda aux cavaliers maîtrisant leur monture de stopper au milieu du manège. Le cheval en liberté en profita pour se défouler et refusait de se laisser attraper. Après quelques tours de galop et s’être détendu, il finit par venir nous rejoindre et le maître de manège le saisit. Et tout rentra dans l’ordre.


Je ne fus pas puni de mon comportement. L’enseignant considérait qu’il était trop tard pour agir. Il rappela à l’ensemble des élèves les consignes de sécurité et l’importance des distances. Il expliqua que lorsqu’un cheval en bottait un autre, et si le cavalier était toujours à sa place, il devait manifester son désaccord par un petit coup de cravache, simplement pour éviter que cet écart de conduite ne devienne une habitude et ensuite un vice.


Je reconnais que j’avais réagi violemment, j’avais réagi par réflexe. Imaginez-vous tranquillement dans la rue et soudain un de vos congénères vous mord les fesses, quelle sera votre réaction ?







SUITE


Uranus me précisa que j’avais eu de la chance. Ce moniteur était adorable, mais ce n’était pas toujours le cas.


Le reste de la reprise se déroula sans heurts. J’avais un cavalier doux et énergique. Ma première reprise fut une des plus agréables de ma carrière. Je ne suis pas objectif. C’était surtout la première et je m’en souviens encore parfaitement.


Ce soir-là, je travaillai deux heures. Le deuxième cours s’effectua sans incidents, avec un cavalier confirmé. Les enseignants me ménageaient, cependant cela n’allait pas durer.






Mon calme et mon flegme, qualités principales que je possédais ne passèrent pas inaperçus. Le niveau de reprise baissa, et malgré ma petite taille, j’étais relativement porteur, des adultes atterrirent sur mon dos. Un poids de quatre-vingt kilos ne me dérangeait pas. Je n’étais pas spécialement costaud, mais comme disait un des enseignants, j’étais constitué de nombreux points de force. Dans le livre d’hippologie, à la page où se trouvent beauté et défectuosité, je ressemble au cheval qui représente la beauté. La classe ! Entre nous, cela ne veut rien dire. J’ai vu des camarades auxquels vous auriez refilé cent balles tant il faisait peine à voir. Ils étaient increvables, jamais boiteux, courageux, et capable de rivaliser dans les concours d’entraînement avec des chevaux de propriétaires qui avaient été achetés un paquet de sou à des cavaliers de hauts niveaux.


Ce jour-là, lors de ma première reprise d’adulte, j’eus droit à un homme tout en muscle, le sportif par excellence auquel rien ne résiste. L’abord, dans la stalle me confirma la force de sa volonté. Je roupillais rêvant probablement à de vertes prairies. Une claque sur ma croupe me ramena sans transition derrière un mur blanc. Je me retournais grincheux et curieux, je découvris mon prochain cavalier. Les caresses furent imaginaires. Je l’entendais marmonner dans sa barbe qui était inexistante. Entre nous il sentait l’après rasage. Heureusement que nous, les chevaux, ne pouvons pas vomir, sinon quelque fois nous pourrions remplir les mangeoires. L’odeur de certains parfums est quelquefois insupportable. Cavaliers ! Soyez sympas avec nous. Nous préférons l’odeur de vos aisselles, à la rigueur un parfum aromatisé à la carotte. J’ai dit «à la rigueur » car nous risquons de vous croquer. J’en reviens à mon cher cavalier qui empestait et murmurait.


- Je me tape une crevette, j’ai horreur des petits chevaux, je ne suis plus un débutant. Au prix de la leçon, il pourrait fournir des chevaux qui ressemblent à des chevaux !


Je sentais que nous allions bien nous entendre. Je faillis perdre deux dents lorsqu’il me mit le filet. Une vraie brute, il m’arracha par la même occasion une oreille. Il ne savait pas mettre le filet, mais il était sûr de lui. Le positionnement de la selle se déroula dans ses normes. Elle chuta sur mon dos, avec le tapis en dessous qui faisait un pli. Il ne s’en préoccupa pas. Lorsqu’il me sangla, je fus surpris, la sangle me passait sous le ventre vingt centimètre en arrière de sa place initiale. Je n’ai jamais toléré les brutes, et bien ce jour là non plus. Avant qu’il puisse fixer la sangle, je décalais discrètement mon antérieur, le posait délicatement sur son pied, opérait une translation de mon poids vers la gauche. Un hurlement jaillit de sa bouche, sa main lâcha la sangle, se saisit d’une cravache et elle se défoula sur moi. La séance de flagellation fut interrompue par une dame qui s’occupait d’Uranus.


- Vous n’avez pas honte de martyriser ce pauvre cheval.


Mon cavalier rouge de colère répondit :


- Il vient de me marcher sur le pied ce c….


Comme je l’ai indiqué au début de ce livre, je ne peux pas me permettre de transcrire intégralement certains mots, de peur de choquer des oreilles sensibles. Pour les curieux et les intoxiqués des mots familiers, je précise toutefois qu’il se termine par D. La cavalière répondit :


- Evitez de mettre votre pied sous le sien. Entre nous, j’avancerais la selle de vingt centimètres. Sinon vous risqueriez de vous retrouver sur un siège éjectable.


Si j’avais pu, je lui aurais sauté dans les bras pour la remercier. Je me contentais de la regarder en bougeant la tête de haut en bas. J’eus droit de sa part à un morceau de sucre. Uranus pour la forme râla.


- Tu manges ma part !


- Avez-vous remarqué ? Non ! Le moniteur est-il intervenu ? Non. Nous le vîmes débarquer et surtout l’entendîmes gueuler :


- À cheval !


Mon cavalier prit mes rênes et m’emmena vers le manège. Je ne bougeais pas, ce n’était pas de la mauvaise volonté. L’imbécile avait oublié de retirer mon licol. J’eus droit à un nouveau coup de cravache sur la croupe. Une nouvelle intervention de la ma voisine résolut le problème. En passant devant elle, je l’entendis me chuchoter bon courage. Effectivement j’en avais besoin. Je redoutais la suite.


Je n’étais pas seul, mon compagnon de postérieur Eclair était présent à ce cours. Il était juste derrière moi. Sur le chemin du manège, il m’interpella.


- Je connais ton cavalier, je l’ai pratiqué une paire de fois. Un sacré morceau à digérer ! Heureusement que mon estomac est à l’épreuve des caractériels. Entre nous, je me suis bien éclaté. Il n’a pas réussi à galoper sur la piste. Bon courage, fait attention à tes molaires, je le soupçonne d’être un arracheur de dents.


La compassion de mon voisin me redonna un peu de courage, cependant pas suffisamment, je n’étais pas décontracté. Ne laissant rien paraître, je lui répondis :


- Pour les dents j’ai déjà donné.


Le moment du montoir arriva. Je n’eus pas le temps de comprendre. Sûrement une résurgence des craintes ancestrales de ma race, je crus être la proie d’un énorme prédateur. Un choc violent, ensuite une impression d’être terrassé par une bête féroce m’incita à prendre la fuite. Je parti comme un malade, cherchant à me débarrasser de ce fauve aux griffes acérées. Quelques sauts de mouton plus tard et je me sentis léger. Je m’arrêtais, me secouais pour chasser l’ombre maléfique de ce monstre. Je regardais derrière moi. Je réalisais mon erreur. La panique et l’instinct grégaire avaient provoqué une hallucination. J’avais mis mon cavalier à terre.


Eclair me cria :


- Attention !


Attention de quoi ! Je ne saisissais pas. J’étais le seul. Le moniteur me saisit par les rênes et de sa main libre, qui n’était pas vraiment libre, elle était prolongée par une cravache de dressage. La cravache de dressage est plus longue que la cravache traditionnelle, et, plus douloureuse. J’eus droit à ma première branlée de ma vie de cheval d’instruction. J’étais indignée par cette injustice. J’avais eu peur, d’accord. Je n’y pouvais rien, ce barbare, lors du montoir, avait cumulé toutes les bévues possibles et inimaginables.


Mon cavalier était à terre. Afin de poursuivre le cours, il devait remonter de nouveau sur mon dos. Je tremblais de tous mes membres. Je me concentrais pour ne pas bouger. La brute s’approcha de moi, prit mes rênes, enfonça sa pointe de pied dans mon flanc. S’accrochant aux rênes donc à ma bouche, il se propulsa rudement sur mon dos. Son ascension se termina soudainement. La selle tourna, mon galop effréné et ma séance de rodéo avait comme conséquence de détendre l’ensemble. Normalement au bout de cinq minutes les cavaliers doivent resserrer leur selle, car nous avons tendance à nous dégonfler. Ma galopade non contrôlée avait eu cet effet. Le moniteur que nous avons surnommé plus tard « capitaine cravache » avait oublié de vérifier. Mon cavalier était au paroxysme de la fureur. Je supputais une nouvelle raclée, elle ne vint pas. La faute humaine était trop flagrante. Ils n’osèrent pas.


Mon soi-disant cavalier finit par atterrir sur mon dos et la reprise pu démarrer. Ce fut un calvaire. Il aurait dû s’appelé Brutus, rien ne me fut épargné. Au trot enlevé, il se soulevait à la force des mains, donc en s’appuyant sur ma bouche. Les contretemps étaient fréquents, mon dos en subissait les contrecoups. J’endurais le martyr. Mon copain Eclair me voyant souffrir me donnait des conseils :


- Trotte plus doucement. En rasant le plus possible le sol.


- Arrache les rênes, il y ait tellement accroché qu’il partira avec.


- Rapproche toi du pare botte, et écrase ses jambes.


- Couche-toi !


J’étais tétanisé. Mon seul but : terminer la reprise sans me prendre une nouvelle correction. A la fin de la reprise, j’eus droit à la cerise sur le gâteau. Je surpris une conversation entre le moniteur et mon soi-disant cavalier.


Le moniteur :


- Vois-tu ! Les chevaux, il ne faut pas les laisser faire ; une correction donnée au bon moment les calme. Le reste de l’heure, il n’a pas bougé une oreille !


- J’ai eu le même problème au boxe, il a cherché à m’agresser, je me suis fâché, il s’est calmé de suite. Une cavalière est intervenue, le défendant j’ai dû m’arrêter.


- Je connais ce genre d’individu, des extravertis de la sensibilité. Genre MLF de l’équitation. Depuis que les femmes pratiquent ce sport nous sommes constamment em….Le seul avantage, je reconnais que c’est un sacré avantage : nous les moniteurs avons une sacrée cote.


J’entendis Eclair commenter la conversation :


- Tu parles d’un vantard ! Depuis mon arrivée, il n’a pas réussi à séduire une seule nana. Il est trop c…


Sacré Eclair, il n’en ratait jamais une. Sa conception et sa rationalisation de la vie m’apportaient du baume au cœur. Cependant ce soir-là, il ne réussit pas à m’extirper de ma morosité.


Lorsque je rentrais au boxe j’étais couvert de sueur. Son origine était le stress et non l’effort.


Ce soir-là, j’eus droit à quatre reprises d’affilée. Notre rythme de travail était en général quatre heures en semaine et cinq à six heures le mercredi et le samedi. Je ne craignais pas le travail. Rester face à mon mur blanc ou me dégourdir les jambes, je n’hésitais pas. Cependant ce jour-là, la première heure avait été harassante nerveusement. En entrant je n’étais plus qu’une loque. Les trois heures suivantes furent un supplice. Je me traînais littéralement. La chance était un peu avec moi, Capitaine cravache ne dirigea pas les cours auxquels je participais.






Le quotidien de notre vie était linéaire. Nous ne nous ennuyions pas, mais notre vie manquait de pétillant. Avec mes voisins, nous arrivions à nous occuper. Nous nous entendions parfaitement. Je n’osais imaginer d’autres voisins. Mon mordeur de fesse, d’après les ragots d’écurie, était un compagnon de stalle exécrable. Ces voisins ne le supportaient plus. Il était lâche et poltron. Il ne nous agressait seulement lorsqu’il ne risquait pas des représailles de notre part.


Voyez- vous les humains, vous n’avez pas la panacée de ces troubles du comportement. Nous aussi avons notre lot de personnes indésirable.


Cependant nous n’avons pas la même affinité. Par exemple : le mordeur, il nous sort pas les naseaux. Au contraire pour vous, il représentait le cheval sympathique. Normal c’était un faux cul.


- Excusez- moi, ma langue a fourché.


Rien n’est plus désagréable que l’injustice, n’est-ce pas ? L’importance du paraître chez vous est primordiale ? Il se jouait de vous comme de sa dernière carotte. Le roi des hypocrites, il vous obéissait au doigt et à l’œil. Cet asservissement n’était pas de gaîté de cœur. Juste la peur de vous affronter.


Il obéissait, d’accord, mais si jamais un cavalier peu confirmé le chevauchait par mégarde, et, si le moniteur lui présentait son dos, il le virait aussi sec. La réaction des enseignants était lamentable. Ils incriminaient le cavalier.


- Pas assez bon pour ce cheval.


Une vraie catin. Seul mon premier enseignant avait ressenti son côté vil. Un soir après une reprise mes oreilles traînaient, ce n’était pas la première fois. Un cavalier encensait l’autre zigoto. Le moniteur répondit :


- D’accord il a des qualités athlétiques, mais sincèrement je ne lui confirais pas mes gamins, il ne m’inspire pas confiance.


Enfin un homme réaliste. Il n’inventait pas, il avait deux enfants. Ils montaient au poney club. J’ai même été leur monture. Ma petite taille me permettait de participer à des reprises poneys. Bien sûr, je n’étais pas chevauché par des enfants de cinq ans. De jeunes adolescents confirmés ou non, travaillaient et jouaient sur mon dos en toute sécurité.


J’étais un animal relativement sécurisé. Je n’avais pas d’air bag, de ceintures, ni d’ABS, par contre anti-patinage, oui ! Cependant il ne fallait pas me chercher. J’avais peut-être été surpris par la brute à mes débuts de cheval d’instruction. Par la suite, ce genre de scénario je le répétais volontairement si le cavalier me manquait de respect. C’est ce que j’appelle de la pédagogie musclée.


Mes meilleurs moments de cette époque étaient lorsque nous nous retrouvions tous les quatre en reprise. Mes deux voisins de côté et mon voisin de postérieur. Quelquefois nous délirions, surtout quand éclair avait décidé de faire le pitre.


Eclair était un bon vivant. Son nom était l’opposé de lui-même. Il prenait le temps de vivre. Tous ses déplacements s’effectuaient lentement. Cinq minutes lui convenaient parfaitement pour rejoindre le manège depuis sa stalle. Il y avait à tout casser cent mètres. Il discutait avec ses compères qui n’étaient pas au boulot. Se renseignait sur l’humeur des enseignants. Rouspétait car la nourriture était trop synthétique, d’ailleurs sur ce sujet il trouvait beaucoup d’échos. Sa conversation terminée, il avançait de quelques pas, puis le nez à terre du bout de ses lèvres attrapait un fétu de paille propre, parfois un granulé échappé de la brouette, ou un morceau de carotte oublié par un cavalier stressé. Le sol nettoyé de tout ce qui pouvait être comestible, il relevait la tête et se dirigeait vers la sortie des écuries. Une nouvelle halte s’imposait, le temps d’habituer ses yeux à la lumière du jour ou de la nuit suivant son créneau horaire. Ensuite quelques pas, et, nouvel arrêt. Son coté contemplatif avait besoin de s’exprimer. Il admirait le paysage qui entre nous n’était pas extraordinaire, mais cela changeait de notre mur blanc. A force d’admirer, ses yeux repéraient les trois brins d’herbes engraissées à l’oxyde de carbone.


J’ai oublié de préciser, que l’autoroute du nord jouxtait notre club. Et comme sur toute autoroute il y a des voitures, et ces dernières ne fonctionnant pas à l’électricité, lorsqu’il y a un vent d’Est, ou pas de vent du tout, elles nous parfument à l’oxyde de carbone et autres effluves non identifiées.


Ceci dit, cela n’empêchait pas Eclair de les dévorer. Le plus court chemin, il ne pratiquait pas, du moins lorsqu’il n’avait pas de cavalier sur le dos. Son trajet dépendait de la place des brins d’herbes. A la grande joie de son cavalier ou de sa cavalière. Le masculin l’emportant sur le féminin, je devrais dire systématiquement cavalier. Aberrant ! Soixante-dix pour cent des cavaliers sont des cavalières.


D’ailleurs si j’étais une femme humaine j’aurais milité en faveur de la priorité du féminin sur le masculin. Vous parlez d’égalité entre l’homme et la femme, je ne veux pas vous vexer, mais vous avez encore beaucoup de chemin à parcourir. Entre nous la femme est supérieure. La preuve : J’ai souvent eut plus d’affection et de respect de la part des femmes. Les hommes, il y a des exceptions, m’ont massacré quelques molaires et quelques vertèbres. Je suis vache avec vous gente masculine, il y aussi des exceptions chez les femmes.


Je n’oublie pas Eclair, il arrive à la porte du manège. Nouveau stop. Changement de clarté, donc ré accoutumance des yeux. Analyse psychologique de l’enseignant. Celui-ci l’attend impatiemment derrière la porte. Eclair est le dernier arrivé. On ne change pas des traditions en cinq minutes. Enfin au grand soulagement du cavalier il entre dans le manège et finit par se stabiliser au milieu du rectangle.


Son caractère paisible, il se définie de cette façon, lui attire, parfois des remontrances. Elles se traduisent suivant l’humeur des antagonistes, par une claque aux fesses, un coup de cravache sur la croupe, et pour les irréductibles de la vitesse par l’utilisation de la chambrière (fort rare). Le remède n’est pas efficace, Eclair accélère sur une distance de deux mètres grand maximum, puis reprend sa vitesse de croisière. Cet acharnement thérapeutique est prodigué en général par les hommes de chevaux. Les cavalières et les cavaliers usent d’autres méthodes moins violentes et toutes aussi efficaces.


Certaines (avez- vous remarqué que j’emploie le féminin ? je l’utiliserais une fois sur deux. L’avantage d’être un cheval est que je peux m’asseoir sur la grammaire, avec mon poids elle n’est pas prête à se relever.) utilisent les carottes et autres friandises. Cela a une efficacité au niveau de l’encolure, extension horizontale de l’encolure. Attention elle n’est pas approuvée par les dresseurs fous. Ensuite extension de la tête puis des lèvres. Si rien ne l’attire sur le sol, il concédera un pas mais pas deux. De temps à autre suivant la générosité des cavaliers il consomme entre un à cinq kilos de carottes aux cinquante mètres. Les économies d’énergies ne sont pas sa tasse de thé.


Sa conduite fantaisiste durant le trajet est un prélude à la reprise. Plusieurs scénarios sont envisageables. Ils dépendent des cavaliers. Eclair s’adapte rapidement au schéma physique et psychologique humain.


Une cavalière angoissée, mal à l’aise avec un équilibre précaire ; il restera soft. Il évitera les démarrages brusque, ne coucheras jamais les oreilles, garderas les distances. S’il sent chez cette dernière une non envie de galoper et une désagréable manie à le quitter sans prévenir, il s’arrêtera directement sur la ligne du milieu à l’ordre « galoper ». Certains enseignants l’acceptent difficilement. Mais Eclair impassible reste campé sur ses quatre jambes. Il dit souvent :


- Cheval immobile


Cavalier tranquille


Cheval au galop


Cavalier en trop


Il adore les maximes, les siennes bien sûr.


Un cavalier tel que mon musclor de la dernière fois, la donne change. Le chemin qui mène au manège s’effectue à la même vitesse peut être plus lentement. Lorsque le cavalier est trop brutal, d’un mouvement violent il arrache les rênes, puis d’un demi-tour leste il rejoint sa stalle. Durant le cour il nettoie le pare botte avec les jambes. Si la main est trop dure il baisse brutalement les rênes en s’arrêtant, cela se traduit parfois par un cavalier en déséquilibre sur l’encolure. A ce moment précis il nous consulte du regard. Si nous acquiescions il garde la tête baissée et le cavalier mus par la pesanteur continue son chemin. Si notre réponse est négative, il relève brutalement l’encolure, et le cavalier rejoint sa selle, non sans accrocher sur le pommeau une partie fort sensible située à l’entre jambe.


Eclair n’agit jamais en égoïste. Il nous prévient avant d’exécuter une de ses facéties. Heureusement que notre champ de vision est large, presque 360°. Nous ne voyons pas en arrière notre croupe. C’est atout nous permettait lorsque nous vivions à l’état sauvage de survivre à l’attaque des prédateurs. J’en reviens à Eclair. Quand il galope juste derrière moi, il m’interpelle de façon à que je ne rate pas un de ses tours. Je suis dans l’obligation de tourner légèrement la tête vers l’intérieur du manège. Je le vois d’un seul œil. Cela suffit. Je ne le vois pas en relief, mais peu importe nous sommes habitué à cette vision. Si mon encolure reste incurvée plus d’un tour, cela arrive, car Eclair n’est jamais pressé d’exécuter ses bouffonneries, j’entends la voix du moniteur félicitant ma cavalière :


- Félicitation, ton cheval a le pli de l’encolure du bon côté.


Ceci est assez rare, les moniteurs sont plus correctifs que valorisants.


Le pauvre musclor n’est pas au bout de ses peines. Le galop risque de rester un mirage inaccessible. Eclair a une logique bien spéciale sur les distances :


- Lorsque je galope, j’essaye de faire le moins de distance possible. Dans un rectangle, il suffit de couper les coins. Ensuite si je réduis petit à petit je me retrouve sur un cercle. Si je le rétrécis j’arrive au centre du manège. Autant allez directement au centre.


Cela ne se passe pas sans réaction de la part de notre tout en muscle. Il sévit à coup de cravache cependant elles n’ont aucune actions sur mon copain.


- je préfère la cravache aux mouches.


- Chut ! Il ne faut pas le dire.


Une petite cavalière énergique et respectueuse ; il sera totalement obéissant. Il galopera sur la piste, sauteras quelques obstacles sans penser à s’arrêter. Si par hasard notre cher musclor est dans la reprise, il risque d’avoir une apoplexie.


Heureusement qu’il est adorable avec les débutants et les personnes attentionnées, sinon, connaissant les humains, il aurait fini en steak haché.


Ainsi lorsque nous nous retrouvons tous les quatre en cour, nous passons d’agréable moment. Mes autres camarades sont plus cool, moins chahuteur.


Uranus mon voisin de droite, comme je vous l’ai dit précédemment est un trotteur réformé. Le stress vécu dans son débourrage l’on speedé à jamais. Est-ce son dressage ultra rapide, ou son côté cheval de course ? Je ne sais pas, lui non plus. Il est toujours pressé. Il aussi rapide qu’Eclair est lent. Le trajet, écurie manège, il ne traîne pas, pas de discussion, pas d’étapes gustatives. Son cavalier peine à le suivre, tout juste s’il ne se métamorphose pas en cerf-volant. Le premier entré dans le manège, c’est lui, le premier sur la ligne du milieu c’est encore lui. Il n’est pas impatient, juste pressé. Rester stoppé cinq minutes ou une heure ne le dérange pas. Le montoir de déroule sans problème. Dès que le moniteur ouvre la bouche et prononce l’invariable phrase :


- Pour marcher au pas, marchez aux pas !


Uranus, dès le mot « pour » est déjà arrivé sur la piste, et en plus sur la bonne main. (Pour les novices la main représente le sens dans lequel les chevaux tournent dans le manège. Main droite, sens des aiguilles d’une montre, main gauche le contraire. Bien sûr pour cela fait-il encore posséder une montre à aiguille, denrée de plus en plus rare) oui, Uranus connaît les habitudes des enseignants. Son pas est vif et rapide, rattraper la queue est une affaire de deux ou trois tours aux pas. Son handicap est le galop. C’est l’avis des enseignants. Il ne le considère pas de cette façon. Il n’aime pas le galop. Par soucis de respecter les règles et les ordres il s’est fabriqué une allure qui peut ressembler au galop. Il galope de devant, ou de derrière. Je n’ai jamais réussis à le définir. Le plus étonnant, est que les cavaliers apprécie, il est très confortable parait-il. Il est très sage. Cependant peu de débutant le monte. Sa vitesse difficilement contrôlable est source de chute. D’ailleurs il ne comprend pas ces humains qui appréhendent la vitesse.


- Quand j’étais gamin je devais trotter le plus rapidement possible, et maintenant je dois aller doucement, et en plus au galop, j’y perds mes carottes.


Il ne craint pas les musclors. Sa bouche est en béton. Même aux reprises de sauts, lorsque que son cavalier a le cul dans la brouette (c’est-à-dire les fesses dans la selle) il n’hésite pas à le soulever par la force de sa mâchoire. Le pourquoi de sa vitesse, j’ai fini en connaître les raisons. Je ne sais si elles sont valables, elles sont humaines.


Uranus aurait un problème d’équilibre, comme les humains disent communément il serait sur les épaules. C'est-à-dire qu’il ne peut ralentir entraîné par trop de point sur ces antérieurs. Je lui dis, la pensée des bipèdes. Il répond :


- Sur les épaules ! Tu les as vu ces charlots, avec leurs grandes jambes et leurs petit bras. Imagine-les à quatre pattes. Si je suis sur les épaules, eux sont sur les dents.


Fin provisoire. Elles a quatre ans. Un provisoire presque éternel