Dans la famille nous ne sommes pas paranos, mais tout le
monde nous en veut. En remontant l’arbre généalogique qui est composé en
majorité de branches mortes, je constate que les membres de la famille n’ont jamais été paranoïaque.
Mon arrière-grand-mère de la branche maternelle a été
retrouvée morte en pleine campagne en chemise de nuit. D’après le médecin dont
la lucidité dépendait de la dose d’absinthe dans le corps constata une mort due
à un arrêt du cœur. D’après les dires de
mon grand- père qui vivait cloitré dans une cave avec comme seule compagnie un
fusil de chasse, ma trisaïeule aurait été poursuivie par une horde d’ennemis.
Mon grand-père du côté de la branche paternelle n’était
pas paranoïaque. A la fin de la guerre de 1940, il acheta un blockhaus allemand
dans le pays de Caux. D’après lui, c’était
le seul endroit où il se sentait en sécurité.
Je me souviens encore d’un coup de fil qu’il passa à mon père dans les
années soixante-dix. Il nous appelait car il avait égaré ses clés, et il ne
pouvait plus sortir de chez lui. Mon père qui avait l’instinct de survie, et
qui l’a toujours, n’a pas bougé d’un pouce. Une porte de blockhaus ne s’ouvre qu’à
la dynamite, et d’après mon père l’entrée était piégée. Nous n’eûmes plus de
nouvelles de mon grand-père. Dernièrement, lors de ma formation à Fécamp, j’ai
appris que sa dernière demeure était tombée à la mer avec un pan de la falaise.
Mon grand-père est surement encore à l’intérieur.
Ma grand-mère de la branche maternelle était lucide. Elle avait un sixième sens qui lui
permettait de détecter ses poursuivants : elle marchait à reculons. Elle est
morte, jeune, fauchée par un cheval de
trait.
Mon grand oncle de la branche paternelle était paranoïaque.
Pourtant il vivait comme tout un chacun. Il était immensément riche, roulait en
Bugatti et participait à toutes les sauteries parisiennes. Il a été assassiné
par un Juif israélite. Il avait fait fortune en revendant les biens des juifs
qu’il avait dénoncés pendant la guerre de 1940. Aux dernières nouvelles de mon
frère qui est aussi une branche morte, mon grand-oncle serait persécuté en
enfer par ses anciennes victimes.
Mon père qui est perché sur une branche vivante refuse d’en
descendre.
Il n’y a que moi qui suis sain d’esprit et de corps. D’ailleurs
afin d’en être certain je me fais suivre par un détective afin d’être sûr de ne
pas être suivi. Et je fais suivre ce détective par un autre au cas où. Je me
fais suivre aussi par un psychiatre. Ce qui fait trois personnes qui me
suivent.
J’en peux plus.
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