une petite précision s'impose


Ce blog de voyage, conçu pour raconter notre périple en voilier, s’est transformé progressivement en un blog hébergeant des articles hétéroclites. Ils sont les récits d’autres périples, plus cérébraux que physiques.
Ma compagne préfère ce style de voyage. Une préférence extrémiste, je suis enfermé à double tour dans un cabinet noir. Seul un clavier lumineux me permet de communiquer avec le monde extérieur.







dimanche 24 novembre 2013

Allergies



Mon plus jeune fils est allergique à l’écriture. Dès qu’une pulsion d’écrire tiraille les deux neurones qui me reste, il se réveille. Si je n’écris pas, je peux me lever durant un mois à des heures matinales sans qu’il réagisse. Si une violente envie me saisit l’arrière train, oui j’ai tendance à réfléchir avec ce qui me sert de fondement intellectuel, une éruption spontanée de boutons recouvre son corps. Ils sont aussi nombreux que les poils d’un ours polaire. Evidemment une démangeaison accompagne l’éruption et le pauvre se réveille en appelant sa mère qui s’empresse de se nicher contre lui ; il y a longtemps que j’ai été éjecté du lit conjugal. Dès qu’une pulsion de ne plus écrire déconnecte les derniers neurones, les boutons disparaissent aussi vite que mes érections de quinquagénaire.
Que faire ?
Nous avons consulté les plus grands spécialistes qui n’ont rien de grand à part leur portefeuille qui se gonfle à chaque consultation. D’après leur immense savoir inaccessible au commun des mortels, notre fils souffrirait de troubles associatifs calligraphiques obsessionnels  compulsifs et d’une névrose post-partum issue d’une fusion avec la couveuse qui a tenté de nous le ravir. Nous avons détruit la couveuse et recouvert notre bien. Depuis cette action violente, sa mère le couve au sens littéral du terme. Toutes les nuits elle s’allonge sur lui afin qu’il ne prenne pas froid. Je l’ai même surprise en train de lui donner la becquet pendant que je lui ramenais des vers de terre.
Les consultations n’ont eu aucune conséquence sur l’allergie de notre enfant, par contre mon compte en banque est devenu aussi plat que l’altruisme chez les financiers. Après  une errance dans le monde de la pédopsychiatrie nous avons changé notre fusil d’épaule en vérifiant bien qu’il n’était pas chargé.
Nous avons donc consulté dans le 18ème arrondissement de Paris un marabout que nous avait conseillé une grande tante par alliance. Après avoir sacrifié une poule, trois mouches tsé-tsé et un politicien véreux, nous eûmes enfin un diagnostic accompagné d’un espoir de guérison :
La réaction de mon fils est sa façon de communiquer. Ne possédant pas le langage, et le langage n’est pas prêt de le posséder, il est obligé d’user de moyens complexes pour nous transmettre ses sensations et ses analyses.
D’après le marabout, mon fils considère que j’écris aussi bien qu’une patate douce et qu’afin de préserver mon équilibre psychique, il préfèrerait que je cesse avant qu’une personne me crache la vérité en pleine gueule.
Depuis ce jour, j’ai une indigestion due à l’ingestion du sacrifice. Le politicien m’est resté sur l’estomac.

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