une petite précision s'impose


Ce blog de voyage, conçu pour raconter notre périple en voilier, s’est transformé progressivement en un blog hébergeant des articles hétéroclites. Ils sont les récits d’autres périples, plus cérébraux que physiques.
Ma compagne préfère ce style de voyage. Une préférence extrémiste, je suis enfermé à double tour dans un cabinet noir. Seul un clavier lumineux me permet de communiquer avec le monde extérieur.







jeudi 10 novembre 2011

Tout fout le camp.


 Aujourd’hui mercredi : jour des enfants. A quand le jour des parents ? Il arrivera le jour où « les poules auront des dents ».
Cette expression sera bientôt désuète. D’ailleurs, ne l’est-elle pas déjà ? Ma culture béotienne ignore toutes les expériences génétiques sur les poules.
D’après certaines rumeurs non identifiées et vérifiées, un savant fou, dont par soucis de discrétion je tairais le nom, aurait créé une poule avec des dents. De nombreux parents, afin d’obtenir une journée de repos par semaine sans les enfants, apprécieraient probablement l’application d’une telle avancée scientifique.
Ce savant aurait, d’après sa propre analyse, été brimé toute sa jeunesse. Comme de nombreux parents, ses parents avaient une conception toute particulière de l’éducation. Ils refusaient toujours de répondre aux désirs de leur gamin. Aux demandes de l’enfant ils répondaient invariablement: tu l’auras quand « les poules auront des dents ».
Après chaque refus, le futur savant, en grand désarroi, se réfugiait chez le voisin. Ce voisin avait deux atouts : il était adorable et possédait quelques gallinacées. Durant une dizaine d’années, l’enfant vint tous les jours trouver du réconfort auprès du voisin, et surtout, il n’oubliait pas de rendre visite aux poules et de vérifier si elles avaient des dents. Evidemment, nourries aux maïs non transgéniques, leur bec n’avait pas muté.
Les années passèrent, l’élève devint étudiant. Sa motivation première était toujours présente. Tous les matins en se rasant, il pensait dent. Le soir lorsqu’il procréait consciencieusement, il pensait dent. La journée au travail, il pensait dent. La nuit, il rêvait dent. Lorsqu’il se brossait les dents, il pensait bec. Bref, c’était devenu une obsession obsessionnelle. Son cursus fut couronné par un Master et il obtint le diplôme de savant fou.
Quelques centaines de jours plus tard, grâce à des cellules souches de dents de poissons, il concrétisa son rêve : une poule avec des dents.
Fier de lui, il retourna voir ses parents avec sous un bras la fameuse poule, et sous l’autre bras, un cartable contenant la liste de tous ses désirs non exaucés.
Ses parents l’accueillirent à bras ouverts et le félicitèrent pour sa réussite. Ils acceptèrent d’écouter la narration de la longue liste sans manifester un seul signe d’impatience. Puis sans hésiter, ils répondirent en chœur:
- Avec plaisir notre fils aimé, nous comblerons tes souhaits à la semaine des quatre jeudis, aux calendres grecques, à la saint Glinglin, à Pâques ou à la Trinité. Néanmoins, tu aurais pu nous remercier de la bonne éducation que tu as reçue. Elle t’a permis de devenir un savant émérite. Ce n’est pas tout, elle te permettra, de devenir un éminent philosophe, un brillant historien, un affabulateur mythomane,  un ésotérique théologien.
Notre savant fou, déprimé par la réponse de ses parents s’enferma dans son poulailler expérimental au milieu de ses poules génétiquement modifiées.
Son assistante le retrouva, du moins retrouva son squelette finement nettoyé. Notre pauvre savant ignorait que les cellules souches provenaient de poisons carnivores d’Amérique du sud : les fameux piranhas.
La rumeur ne précise pas si avant de décéder, il avait trouvé la parade aux expressions préférées de ses parents.

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