Le soir avant de me coucher, je sélectionne quelques
sujets pour l’article du lendemain. Ils sont déposés à côté du pc, dans une
soucoupe. Le matin après le café, je n’ai plus qu’à piocher et le sujet
s’affiche sur l’écran. De temps à autre lorsque je l’attrape, il est réticent
et se débat.
Mais là, ce matin, je n’en reviens pas ! La
soucoupe est vide et n’est pas volante. Les sujets seraient-ils volatiles, comme
certaines soucoupes.
Volatiles ??? J’explose, ce mot provoque en moi
un émoi et une montée d’adrénaline. J’ai les doigts qui frétillent et les yeux
qui s’injectent de sang. Je tremble, l’instinct accumulé depuis des générations
éjecte de son trône ma réserve artificielle. Je farfouille dans une malle et en
sort un fusil de chasse ainsi qu’un treillis et une cartouchière. La
cartouchière est vide. C’est quoi ce bordel ? Je panique, il me faut ma
dose. Je soulève et renverse la malle, seul tombe un appelant souchet mâle. La
vue du canard décuple la dose de TNT qui est en moi. Je prends une massue,
j’apprendrai plus tard que c’était un rouleau à pâtisserie, et commence à
massacrer tous les objets à ma portée à la recherche de ces maudites cartouches.
Comment vais-je tuer ces volatiles sans
elles ?
Je vacille, je perds l’équilibre.
Je me réveille. Je réalise aussitôt que j’ai eu une
crise, et que ma femme réveillée en sursaut, a agi en conséquence. Je le sais,
car j’ai une seringue encore fichée dans le ventre. Elle m’a endormi avec un
fusil hypodermique qui appartenait à son père. Il endormait les grands animaux
d’Afrique afin de les examiner.
Je vais essayer de vous expliquer ma folie
meurtrière. Notre famille est implantée en Picardie depuis des siècles. Nous
sommes des Picards de père en fils, surtout de père en fille, de mère en fils
et de sœur en frère ; ma famille, chasseuses de volatiles et surtout de canards,
dans la baie de Somme ne voulait pas que des intrus contaminent notre lignée.
Lorsque la consanguinité était trop forte et que les filles ne créaient plus
que des idiots, les plus jeunes partaient en séminaire dans les abbayes, afin
d’être fécondées par Dieu. Ainsi, de génération en génération, nous avons
réussi à garder un sang pur et divin.
Enfant unique, j’ai au grand désespoir de mes
parents, interrompus la chaine génétique. J’ai bien effectué un stage chez les
curés, mais étant de sexe masculin, je n’ai pu être fécondé. Alors ma mère
dépitée me proposa de l’engrosser, afin de garder notre sang pur. J’ai refusé
et me suis enfui. Par précaution, je me suis fait stériliser. J’ai des enfants
qui sont issus de la banque du sperme. Ainsi une lignée de malades mentaux et
de pervers se termine. Malheureusement l’atavisme reste présent et certains
mots sont des détonateurs. Maintenant, excepté mes crises, je profite d’un
entourage calme et sain.
- Papa ! Papa ! Papa ! Maman est dans
la rue avec un fusil et court après un camion en criant : faut
l’endormir ! Faut l’endormir ! L’éléphant !
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